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Fiscal

Revenus de capitaux mobiliers

Imposition des revenus réalisés par l'intermédiaire de structures établies hors de France et soumises à un régime fiscal privilégié

I. Principe d'imposition des revenus réalisés par l'intermédiaire de structures établies hors de France et soumises à un régime fiscal privilégié

Lorsqu’une personne physique domiciliée en France détient, directement ou indirectement, 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique (personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable) établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié, les bénéfices de cette entité sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers pour cette personne physique (CGI art. 123 bis).

Cette disposition n'est pas applicable lorsque l'entité est établie ou constituée dans un État de l'Union européenne et que son exploitation ou la détention d'actions, parts ou droits en son sein ne peut être regardée comme constitutive d'un montage artificiel dont le but serait de contourner la législation fiscale française (CGI art. 123 bis, 4 bis).

En outre, lorsque l’entité est établie dans un pays n’ayant pas conclu de convention d’assistance administrative avec la France (ou dans un État ou territoire non coopératif), le revenu imposable de la personne physique ne peut pas être inférieur à un montant forfaitaire déterminé selon des modalités prévues par la loi (CGI art. 123 bis, 3.al. 2).

II. Question posée au Conseil constitutionnel

La question posée au Conseil constitutionnel était de savoir si ce dispositif est contraire aux principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, en raison des présomptions irréfragables de fraude fiscale qu'il institue. En effet :

-d'une part, le contribuable ne peut pas faire échec à la présomption de distribution en apportant la preuve que l'interposition d'une entité juridique établie ou constituée hors d’un État membre de l’'Union européenne n'a pas pour objet, dans un but de fraude fiscale, l'appréhension de bénéfices dans un État soumis à un régime fiscal privilégié ;

-d'autre part, lorsque l'entité juridique est établie dans un État ou territoire non coopératif ou n'ayant pas conclu de convention administrative avec la France, le revenu imposable est égal à une valeur plancher définie forfaitairement en fonction de l'actif net de l'entité.

III. Décision

Le Conseil constitutionnel maintient le principe de présomption de distribution mis en place par le législateur dans un but de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, objectif de valeur constitutionnelle.

Toutefois, il constate qu'aucune autre disposition législative ne permet au contribuable d'être exempté de cette présomption de revenus distribués en prouvant que la localisation de l'entité dans un autre État ou territoire n'a pas pour objet ou pour effet un tel contournement.

Les dispositions du 4 bis de l’article 123 bis, contraires au principe d’égalité devant les charges publiques, sont jugées non conformes à la Constitution. Ainsi, le contribuable peut désormais, quel que soit l’État ou le territoire dans lequel l’entité est localisée, faire échec à la taxation en l’absence de montage artificiel visant à contourner la législation fiscale française.

Concernant la question de la valeur plancher du revenu imposable, le Conseil a émis une réserve d’interprétation : les dispositions du second alinéa du 3 de l'article 123 bis du CGI ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au principe d'égalité devant les charges publiques, faire obstacle à ce que le contribuable puisse être autorisé à apporter la preuve que le revenu réellement perçu par l'intermédiaire de l'entité juridique est inférieur au revenu défini forfaitairement en application de ces dispositions.

Cette décision d’inconstitutionnalité s'appliquera à compter de la date de sa publication au JO.

Décision n°2016-614, QPC du 1er mars 2017

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